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Sport et management, même combat ?

Faut-il être un athlète pour avoir sa place dans l’entreprise d’aujourd’hui ?

Force est de constater que les managers mais aussi leurs collaborateurs sont soumis aux mêmes exigences que les sportifs compétiteurs sur bien des points.

Objectifs ambitieux et pression des résultats, concurrence féroce, gestion de situations complexes, capacité à trouver rapidement de nouvelles alternatives qui fonctionnent, sollicitation des ressources pour faire face aux situations de doutes, d’adversité ou d’échec, endurance et efficacité sur le long terme.

Si les seules qualités physiques permettaient de garantir la victoire, on pourrait prédire le succès en se basant sur les données physiologiques. Heureusement, la technique entre en jeu mais c’est encore insuffisant. Des athlètes aux caractéristiques physiques hors normes et maîtrisant parfaitement leur art sont nombreux comme en management d’ailleurs, mais la technique seule ne suffit pas !

Le sportif de son coté, va consacrer un temps important à sa préparation (Physique, Technique, Tactique, Mentale) pour être en mesure de faire face à un maximum de contextes et de situations tout en préservant son intégrité. Mais qu’en est-il du manager ou du collaborateur en entreprise ?

Soyons humbles et objectifs : il est rarement préparé au match qui l’attend !

L’intégrité à long terme des employés : une préoccupation majeure

Dans le sport, le Coach a une priorité : préserver l’intégrité de son athlète. Blessé physiquement ou moralement, il ne peut plus s’entraîner ni performer. L’outil de production est donc en panne.

Dans l’entreprise, bien que des évolutions soient à relever, on est très loin de ce genre de considérations. On parle beaucoup de « Burn out ». L’intégrité physique et mentale des salariés ne fait pas encore assez partie des priorités. Dans l’univers sportif, au moindre coup de fatigue ou de blessure, les experts mettent directement en avant l’erreur éventuelle de l’entraîneur.

L’entreprise s’inspire du sport : engagement, réussite… Mais elle n’a fait que s’approprier la symbolique du sport, ce qui est visible : la performance au moment de la compétition. Elle n’intègre pas assez l’écosystème sportif en amont de la performance : les entraînements, la gestion délicate de l’intégrité physique et mentale de ses athlètes.

Tous des sportifs de haut niveau ?

Bien sûr, nous n’avons pas tous le même niveau d’envie ou de capacité à devenir des champions au travail et encore moins à se mettre ou remettre au sport pour cela !

Cependant, les échanges entre sport et entreprise proposent d’aller plus loin que d’installer une salle de sport dans le sous-sol de l’organisation. Avec l’adoption d’un management sur la base du modèle sportif, il ne s’agit plus uniquement d’encourager la pratique sportive mais d’adopter un mental de sportif de haut niveau.

D’une part, le sport véhicule des valeurs et des stratégies d’équipes très proches du management : leadership, accomplissement et dépassement de soi, capacité à mobiliser à souhait des ressources cachées, persévérance, motivation, objectifs, performance.

D’autre part, ces techniques stimulent des compétences que l’on sollicite trop peu alors qu’elles sont essentielles pour atteindre de meilleures performances ou pour réussir à s’épanouir au travail (notion de satisfaction, d’utilité et d’efficacité) : gestion des émotions, bonne condition physique, esprit collectif, mental de gagnant (ou de réussite), soutien et accompagnement continu pour booster les performances.

5 pistes pour appliquer les techniques du sportif de haut niveau dans mon quotidien 

  1. L’excellence dans ta préparation tu viseras

Stéphane Heulot est un ancien cycliste de haut niveau. Il est convaincu que n’importe quel collaborateur dispose d’un potentiel d’excellence qui peut être libéré grâce à des exercices pratiqués par des athlètes :

« J’ai toujours visualisé, imaginé, rêvé de mes exploits avant qu’ils ne se réalisent. Pendant chaque entraînement, je visualisais tous ces moments, convaincu qu’ils arriveraient. Dans ma position de Coach, visualiser c’est aider le coaché à ancrer sa nouvelle perception de la situation ».

Piste : écrivez et partagez une vision motivante de l’avenir pour vous même et vos collaborateurs, déclinez la en une mission puissante et traduisez la en projets ambitieux auxquels toute les équipes vont contribuer.

  1. Sur tes points forts tu t’appuieras

La plupart des sportifs et des équipes sportives de haut niveau le disent : les matchs se gagnent en s’appuyant sur les points forts ! Hors ce n’est pas quelque chose de naturel car on a tendance à vouloir prioritairement faire progresser ses points faibles (ce qui demande une énergie et une motivation bien plus importante). On est vraiment bon surtout dans ce que l’on aime faire et dans ce que l’on sait bien faire voir mieux que les autres ! En d’autres termes, trouvez votre (vos) point (s) fort (s), tout le monde en a ! Au-delà de la technique, Florent Manaudou s’est appuyé sur ses 2 points forts pour faire la différence et devenir champion olympique : sa préparation mentale et physique. Selon son Coach, les autres sont aussi bon techniquement !

Pistes : identifier ses points forts et voir comment les transformer en points d’excellence. Identifier ses points faibles et voir comment les neutraliser pour les amener à un niveau qui n’est pas contraignant pour l’exercice de la fonction.

  1. « L’expérience optimale » ou le « flow » tu rechercheras

C’est ce qui se rapporte à un sentiment de bonheur, de satisfaction et de joie intérieure que nous pouvons ressentir au moment ou nous faisons quelque chose au point de ne pas voir le temps passer.

Comment y arriver ?

Clé n°1 : Trouvez le bon équilibre entre les compétences existantes ou disponibles et la complexité des tâches ou des missions à accomplir. Soyez ambitieux mais réalistes !

Clé n°2 : Vivez l’instant présent.

Dans le monde du tennis, Rodger Féderer le disait encore dans une récente interview : « je joue chaque point et frappe chaque balle en me fixant des étapes à court et moyen terme et en donnant chaque fois le meilleur de moi-même dans l’instant ». !

Une présence dans « l’ici et maintenant » permet de focaliser toute son attention sur ce que l’on fait en évacuant les pressions et les préoccupations pour ne conserver que le plaisir du jeu. Serait-ce le secret de sa longévité au plus haut niveau sur le circuit mondial ?

Approche intéressante dans un monde professionnel changeant où l’on passe souvent à un nouveau projet avant même d’avoir atteint la cible du précédent ! On parlera davantage de plaisir dans l’action instrumentale plutôt que de l’atteinte du résultat final.

  1. Des moments de récupération tu t ‘octroieras

Les moments de récupération sont omniprésents dans le monde sportif, que ce soit en match ou à l’entraînement. Ils ne servent pas uniquement à récupérer physiquement mais également à faire le point sur la motivation (Mental), la maîtrise du jeu (Technique), la stratégie passée et à venir (Tactique) à l’image des mi-temps pour un sport collectif (Coupe du monde en 1998 dans les vestiaires avec Aimé Jacquet) ou d’une pause pour les sports individuels (Changement de côté tous les 2 jeux au tennis par exemple).

Dans le monde professionnel, la récupération s’apparente davantage au temps légal à prendre pour compenser des horaires, une forte période de travail ou un investissement particulier. Alors que, comme nous l’avons déjà évoqué en introduction, il conviendrait de préserver sa propre intégrité physique ou mentale ou celle de ses collaborateurs.

Pistes :

  • S’autoriser des moments et des espaces temps pour « lever le pied » et échanger sur d’autres choses que le travail (au travail).
  • Ecouter son corps et les signaux d’alertes (les sportifs savent quand ils sont en forme et dans de bonnes conditions juste en se connectant à eux-mêmes).
  • Organiser et gérer son temps en incluant des moments plaisir et repos.
  1. A gérer l’échec tu apprendras

Aucun athlète de haut niveau n’a un taux de réussite de 100% mais un champion du monde peut parvenir à transformer un échec car cela est constitutif de sa performance. Un manager peut essayer de posséder cette même capacité. Pour illustrer cela, nous pouvons reprendre les propos de Nelson Mandela : « Je ne perds jamais ! Sois je gagne soit j’apprends ! ».

Autre dimension : un entraîneur sportif sait appréhender les défaites d’une équipe. Cette gestion s’appuie sur des dimensions émotionnelles, d’autant plus que la performance d’un groupe est mise sous les feux de la rampe médiatique plusieurs fois par semaine. Un Manager peut s’inspirer de ces techniques lorsque les succès ne sont pas au RDV…

Pistes :

  1. Autorisez-vous puis instaurez la notion  « d’essai-erreur »
  2. Transformez la notion d’échec en « non atteinte provisoire de l’objectif ».
  3. Acceptez que tous les paramètres de la victoire ne dépendent pas que de vous ou de l’équipe
  4. Accueillez et gérez les émotions associées (frustration, colère, déception) en acceptant le processus de deuil
  5. Analysez et remettez-vous en perspective d’une meilleure performance rapidement.

Au final et même si toutes les techniques issues du monde sportif ne sont pas forcément transposables à celui de l’entreprise, l’une des sources majeures de réflexion réside sans doute dans la capacité des sportifs à faire émerger, à cultiver puis à entretenir des facteurs de motivations « intrinsèques » associés à une grande capacité d’auto-détermination.